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Une vision commune qui tienne compte de nos différences d’appréciation

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Le premier est de mettre à la disposition de décideurs tant civils que militaires ou d’experts (analystes, chercheurs, industriels, journalistes spécialisés, notamment) des « textes de référence », des analyses, des études, des articles traitant des enjeux actuels vus sous l’angle de la défense et de la sécurité,. Des textes de qualité qui ne soient pas « saucissonnés »…

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« Quand on veut, on peut. Quand on peut, on doit » : La priorité : « refaire Nation » - 1 -

Fin décembre 2019, un nouveau virus va se répandre en un temps record depuis la Chine dans le monde entier, avec les conséquences dramatiques que l’on sait. Un virus qui, au fil des mois, va vraisemblablement s’affirmer un jour comme l’un des plus redoutables que l’on ait pu connaître, comme la peste au Moyen-Âge…  


211 millions de personnes ont été infectées, 4 millions 424 mille sont mortes à ce jour et près de 5 milliards de doses de vaccins ont été inoculées. Et ce bilan n’est que provisoire, au moment où l’on parle d’une « quatrième vague » alors que la situation de certains pays est quasi catastrophique, que des milliards de doses manquent à l’appel et au moment où le variant indien se révèle particulièrement dangereux.  


Pendant ce temps en France, les manifestations se succèdent dans la rue contre la vaccination et contre tout contrôle sanitaire. C’est à se demander si la folie ne gagne pas certains esprits. En tout cas, pas de quoi grandir l’image de notre pays ! 


Au-delà des morts dénombrés – 628.000 aux États-Unis, 574.000 au Brésil, 252.000 au Mexique, 131.000 en Grande-Bretagne, 128.000 en Italie, 113.000 en France, 91.000 en Allemagne, 15.700 au Japon, l’heure de vérité sur le plan économique et social devrait bientôt sonner. Et avec elle le glas de certains pays.  


Alors, comment éviter le pire demain en admettant que cela soit encore possible aujourd’hui ?  


En écoutant peut-être – enfin – ceux qui ont démontré pendant toute leur vie que « quand on veut la paix, il faut préparer la guerre » comme le dit le vieil adage.  


La France a encore la chance d’avoir des « ressorts », d’avoir des hommes et des femmes d’exception, qui savent partager une vision, toujours disponibles pour la
collectivité, des gens dont la compétence professionnelle est reconnue : qu’ils soient civils et ou militaires. Dans le secteur public comme dans le secteur privé. Y compris parmi nos élus.  


Mais quand ceux qui gouvernent n’ont pas de vision et ne savent manifestement pas se servir d’une boussole, on peut alors redouter le pire et aussi douter de réussir à désamorcer les crises économique, sociale et politique qui sont devant nous avant qu’elles n’explosent à court terme.  


Pour cela il n’existe qu’un seul grand remède : rétablir la confiance. Et agir en sachant qu’on n’a plus le droit à l’erreur. 


Pour cette raison, la Voix du Béarn a décidé de rediffuser quelques-unes des émissions diffusées en plein confinement pour redonner espoir aux Français de France sans oublier ceux de l’étranger qui se sont souvent senti abandonnés.[2]  


La première de ces émissions a été diffusée le 17 avril 2020. Nous avions invité deux généraux d’armée, le général Jean-Paul Paloméros, ancien chef d’état-major de l’armée de l’Air avant de piloter la transformation de l’OTAN, et le général Marc Watin-Augouard, une des grandes figures de la Gendarmerie nationale qui restera comme le ou l’un des précurseurs dans le domaine de la lutte contre la Cybercriminalité. Il a été l’initiateur du FIC, le Forum International de la Cybersécurité, « l’événement de référence en Europe en matière de sécurité et de confiance numérique ».  


Deux « hommes d’action dans la pensée », comme nous en avons dans ce pays, mais plus encore, « des hommes de pensée dans l’action » ce qui est nettement plus rare. A vous de juger en écoutant leur propos. 


Nous avons donc décidé avec Jean-Michel Poulot de donner la parole pendant le confinement à des hommes et à des femmes qui ont fait leurs preuves dans les moments difficiles. On remarquera que très peu appartiennent à des formations politiques. Ces personnes ont en commun d’être très qualifiées sur certains sujets au point d’être devenues des références, que, curieusement, l’on n’entend pratiquement jamais et que l’on ne voit pas davantage sur les étranges lucarnes… Des gens qui, pourtant, ont quelque chose à dire et qui le disent bien. Ils appartiennent à cette lignée des bâtisseurs qui ont fait la grandeur de la France. Avec eux, un combat n’est jamais perdu d’avance, tant qu’il y a une volonté politique, accompagnée d’une vision au sommet de l’État et des gens de valeur pour les mettre en œuvre. Ces trois conditions étant « incontournables ». 


Force est de reconnaître que la classe politique a perdu la confiance des Français, chose qui n’est pas vraie dans de nombreux autres pays dans le monde. En Allemagne, notamment, où les politiques ne sont pourtant pas considérés comme des lumières par l’opinion. 


Que dire ? Sinon que la France a des institutions solides que lui a légué le général de Gaulle. Elle a aussi des hommes et des femmes courageux, compétents et disponibles. Elle peut donc s’en sortir à une condition, qu’elle le veuille vraiment et que les Français se rassemblent pour « faire nation ». Si un tel miracle se produisait, 90% de nos hommes politiques professionnels passeraient aux oubliettes de l’Histoire, aux  prochaines élections. A nos yeux, ce ne serait pas un mal… On comprend que notre propos dérange ceux qui entendent continuer de profiter de cette situation. 


Cultiver notre mémoire institutionnelle 


Même confinés, nous avons décidé de donner la parole à ces hommes et à ces de telles femmes d’exception qui ont un « vécu » opérationnel hors-norme et qui ont passé leur vie à « préparer le temps long » pour ne pas insulter l’avenir. Qu’ils en soient remerciés. Leur contribution nous honore.  


Sachons exploiter ce vivier pluridisciplinaire de personnes d’exception. Sachons mettre à profit leur expérience, leur dynamisme et leur façon de « jouer collectif ». Gageons que leur exemple sera rapidement communicatif. Avec eux, un combat n’est jamais perdu d’avance avant d’être livré, tant qu’il y a une volonté politique, accompagnée d’une vision au sommet de l’État et de gens de valeur pour les mettre en œuvre. Trois conditions incontournables. 


« Quand on, veut, on peut. Quand on peut, on doit » aimait dire Napoléon Bonaparte qui avait aussi prédit : « quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera » … Sur le possible et l’impossible notre empereur avait encore une opinion qu’il avait su faire partager… certes, le monde d’hier n’est plus celui que nous connaissons !
 

Mais pour y parvenir, la route sera longue. Rien ne permet de prédire un retournement de situation, hormis peut-être une timide reprise de l’économie, un secteur qui a été défendu avec un certain succès, mais à quel prix ! En laissant sur le carreau beaucoup de professions sans oublier les jeunes, les étudiants notamment. 


Pour éviter ces errements du passé, il faut rappeler avec lucidité ce qui s’est produit au cours des 20 mois qui se sont écoulés.  Ne pas oublier qu’au tout début, les mesures dites « barrière » les plus élémentaires ont été négligées pratiquement partout, sauf dans les pays d’Asie du Sud-Est. Heureusement une minorité de personnes a réagi immédiatement mais dans très peu de pays en cherchant des solutions, qu’il s’agisse de vaccins ou de médicaments efficaces.
 

Et puis il y a eu tous les autres… Comme en France, ceux qui préféraient « laisser passer Noël ». Ceux-là tenaient la rampe car les « fêtes de fin d’année » c’est sacré !
 

Les mêmes affirmaient, fin janvier 2020, à propos de ce virus censé venir d’un pangolin pour lequel on n’avait toujours pas trouvé de nom: « un de plus » ... ou encore : « Seul les Chinois sont concernés ». Sans oublier les experts « autorisés » qui parlaient de « grippette » comme Agnès Buzin, ministre de la Santé, le 16 février 2020.[1] 


L’exécutif français avait les yeux rivés sur les élections municipales à venir. « L’affaire
Griveaux » faisait la Une du monde entier. Et personne ne croyait en la découverte rapide d’un vaccin efficace avant de longues années ! 


Si l’on ajoute au fil des semaines les brillantes « prestations » télévisées de Sibeth Ndiaye, que l’on aurait mieux vue dans un film avec les pieds nickelés que comme porte-parole du gouvernement, on a un cocktail explosif et l’on comprend mieux
que ce qui restait de « la confiance avec nos élites » avait fondu comme neige au soleil. Or, sans cette confiance, aucun pouvoir n’est à même de gouverner ! D’autant qu’au fur et à mesure que le virus, baptisé entretemps « Covid 19 », faisait des ravages, on découvrait petit à petit que, depuis 2012, tout ce qui avait été prévu pour affronter ce type de pandémie manquait à l’appel. Pire encore, que l’essentiel avait été sacrifié sur l’autel de la RGPP ! 


Alors que les hôpitaux étaient saturés, la communication officielle à laquelle on aurait pu s’attendre n’était pas au rendez-vous. Chaque soir le directeur de la santé comptait les morts après que le ministre de la Santé se soit félicité de sa propre action en balayant d’un certain mépris tous ceux qui émettaient le moindre doute sur l’efficacité
des mesures prises. En revanche, on applaudissait les soignants sur les balcons à 20 heures précises ! 


De mensonge en mensonge, la multiplication des « en même temps » propre au système macronien, l’absence parfois du simple bon sens, un sectarisme certain, sans oublier le ton comminatoire employé par le pouvoir, tout cela a largement contribué à la démonétisation de la parole officielle, donnant libre cours à toutes les folies complotistes. 


Que dire, enfin, d’un président qui a revendiqué, non sans fierté, l’avantage d’avoir une majorité composée d’amateurs au Parlement ! Si l’on ajoute à cela une impréparation chronique – propre aux système Gaulois – et une longue tradition qui veut que le pouvoir politique ne donne aucun crédit à ceux qui cherchent à les alerter ou à les mettre en garde, comme pour les guerres de 1870, 1914 et 1940, le pouvoir politique en
France a des principes et « on s’y tient ». Malheur à ceux qui apportent les mauvaises nouvelles. On devrait se souvenir que c’est ce qui avait perdu Néfertiti ! 


C’est ainsi au fil des générations et des batailles perdues que la « grande Nation » est
devenue une « nation moyenne » ! Il est vrai que succéder à Louis XIV, Napoléon ou De Gaulle est tout sauf évident.  


Joël-François Dumont 

[1] Coronavirus, « mascarade » et « grippette » : la mémoire sélective d’Agnès Buzyn 

[2] La stigmatisation des Français de l’étranger a de beaux jours devant elle  

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Honneur aux anciens, honneur à Jean Billaud, l’homme à qui « De Gaulle a donné des ailes »

Honneur à un de ces « grands » anciens dont le souvenir restera gravé dans nos mémoires. Honneur à Jean Billaud… Né dans un petit village des Deux-Sèvres, à Frontenay Rohan-Rohan, Jean est très tôt orphelin d’un père mortellement blessé dans la locomotive qu’il conduisait. Engagé à 18 ans en 1940 comme élève-pilote à Rochefort, il est rapidement démobilisé. En 1942, le soir, il écoute Radio Londres et entend la voix d’un général qui a refusé la défaite et qui mobilise les Français de France et du bout du monde au micro de la BBC. Après l’invasion de la zone libre, avec un de ses camarades, André Gréard, qui deviendra un des pilotes les plus emblématiques d‘Air France, ils décident de rallier les Forces Aériennes Françaises Libres en passant par l’Espagne.  


Au départ, rien ne prédestinait Jean Billaud à devenir un de ces héros qui écriront dans le ciel une des plus belles pages de notre histoire contemporaine. En 1942, il n’a que 20 ans … « Il est pourtant chargé d’âme et sa très jeune épouse attend leur second enfant, mais sa décision est prise. A l’âge de toutes les insouciances, rien ne lui semble impossible, et déjouant les patrouilles il franchit les Pyrénées avant d’être finalement capturé par la Guardia Civil espagnole. Après six mois d’internement dans le terrible camp de Miranda, il est échangé contre du blé par la Croix Rouge. Malgré de nombreuses péripéties, il rejoint enfin Londres en 1943. Il est recruté par la Royal Air
Force, et c’est dans la bulle arrière d’un Halifax, comme mitrailleur de queue, qu’il va faire la guerre au sein du Bomber Command, non sans avoir subi l’entrainement si exigeant des aviateurs britanniques engagés dans la campagne aérienne stratégique contre l’Allemagne où il accomplira 28 missions de bombardement de nuit, jusqu’en avril 1945. Il survivra là où périrent la moitié des équipages engagés dans la bataille, et
furent abattus plus de 12.000 bombardiers
.»[1] 


Christian Paris lui a consacré un livre autobiographique : « De Gaule m’a donné des ailes ». [1] Un livre aussi émouvant que riche en anecdotes rares.  


Lorsque Christian, ancien commandant de bord à Air France, nous a mis en contact avec Jean Billaud, nous avons tout de suite partagé avec Jean-Michel Poulot sa conviction acquise lors de leur première rencontre. Nous nous trouvions devant « un grand homme oublié. Deux raisons à cela : une humilité absolue, ascétique, conjuguée à un souci quasi obsessionnel de ne pas tirer la couverture de l’Histoire à lui, de ne pas faire d’ombre au petit cimetière d’Elvington [2] où reposent tant de ceux qu’il appelle affectueusement « ses camarades ». La seconde cause de ce glissement vers l’abîme de l’oubli est cette capacité des peuples à l’amnésie collective face à certains pans de l’Histoire… Les héros des périodes sombres finissent par déranger tant leur seule présence constitue le douloureux rappel de ce qui a manqué aux autres, à tous les autres… »[1] 


A la fin de la guerre, démobilisé, il quitte le Squadron 346 « Guyenne » et revient en France par ses propres moyens et découvre que les gens comme lui qui ont combattu dans la RAF ne suscitent aucun enthousiasme au ministère de l’Air ou à Air France… « Ce pays pour lequel il a combattu ne le reconnaît pas ». Il quitte alors Paris en stop pour retrouver enfin sa femme et découvrir leur fille qui a plus de 2 ans. C’est décidé, il reprend son balluchon et va poser ses valises au Maroc où « il est embauché par les Rollin, un couple ami et soutien financier du Général de Gaulle, pendant la durée de la guerre. Apprécié, Jean devient leur homme de confiance et c’est tout naturellement qu’il sera présenté au Général lorsque celui-ci viendra en compagnie de son épouse au baptême d’Yves, leur petit fils. Pendant douze jours, il sera le guide du couple de
Gaulle, qui a immédiatement de la sympathie pour ce jeune homme, qui appartient
à la famille des Forces Françaises libres. Les liens établis ne se distendront jamais.»[1]  


« Après la guerre la vie du commandant Jean Billaud prend un nouveau tournant. Vouant une loyauté indéfectible au général Charles de Gaulle depuis son combat dans la Seconde Guerre Mondiale, il deviendra son homme d’action. Il est ainsi projeté aux quatre coins du monde pour remplir des missions délicates, en commençant par suivre les traces des pionniers de l’Aéropostale au Maroc. »[3] 


Après dix années riches en aventures au Maroc, un évènement va changer une fois encore son destin : l’interception de l’avion du leader de l'opposition algérienne, Ahmed Ben Bella, sur ordre du gouvernement Guy Mollet. Les Français deviennent alors persona non grata au Maroc. Désormais sans emploi, Jean recontacte son supérieur de la RAF, le Capitaine André Puget, devenu chef d'état-major de l'armée de l'Air. Le général Puget réintègre Jean, mais à deux conditions : en qualité de pilote d'hélicoptère et pour servir en Algérie, où il accomplira plus de 500 missions et où il jouera un rôle-clé dans l'échec du putsch des généraux Salan, Jouhaux, Challe et Zeller.
Le Général de Gaulle lui saura toujours gré de cette fidélité. 


Après l’Algérie, ce sera l’Allemagne où Jean Billaud commande à Lahr le détachement d’hélicoptères des FFA, les forces d’occupation françaises. Mais « Jean s’ennuie, il n’est pas fait pour l’inaction ». Il sollicite une affectation plus « active », et ne sera pas déçu, car c’est en Asie qu’elle va le conduire.


Jean va changer de vie, une fois de plus, mais pas d’horizon en devenant un homme de l’ombre chargé des missions de confiance du général. Au Laos d’abord, puis au Cambodge, jusqu’au 1er septembre 1966. « Pilote d’hélicoptère, il assure la surveillance du cessez-le-feu au Laos, où son appareil est abattu à deux reprises. Il est par la suite affecté au Cambodge, puis au Burundi et aux Comores en qualité de pilote personnel des deux chefs d’État respectifs, sans oublier l’Algérie où il contribue à déjouer le Putsch des généraux en 1961.»[3] 


Ce 1er septembre, le général de Gaulle est à Phnom Penh pour y prononcer un discours qui aura une portée planétaire. Jean, pilote de Sihanouk est à ses côtés. Le général lui dit alors : « Billaud, il faut songer à rentrer. On a besoin de vous en France ». Pour cette nouvelle mission, Jean Billaud doit démissionner de l’armée de l‘Air avant de partir en
mission en Afrique où il deviendra le pilote du chef de l’État du Burundi et le représentant du SDECE, directement branché sur l’Élysée. 


« Il deviendra son homme d’action. Il est ainsi projeté aux quatre coins du monde pour remplir des missions délicates ».[3] 


A la mort du général de Gaulle, Jean Billaud poursuivra sa tâche pendant de longues années… Après une première affectation pendant dix ans au Burundi, auprès du Président Micombero, où il vivra la première guerre interethnique "hutu-Tutsis", il est envoyé aux Comores auprès du Président Ahmed Abdallah. Jusqu’au jour où celui-ci est convié au sommet des chefs d’États d'Afrique de l'Est, le désormais célèbre « Carrefour du Développement »…  


Ce sommet semble avoir été conçu dans un seul but : servir de prétexte au financement occulte du Parti Socialiste. Chose que Jean ne pouvait pas ne pas découvrir très vite sur place, en raison de ses liens personnels au Burundi, en particulier avec le Président du pays, Jean-Baptiste Bagaza, ou encore avec le chef d'état-major des Armées. L'Élysée sentant planer la menace s'oppose fermement à la présence de Jean Billaud à cet évènement. 


Effectivement, Jean à Bujumbura n’a pas mis longtemps à découvrir le pot aux roses. Il constate que le jeune ministre de la coopération, Christian Nucci, s’était vu confier « un budget très supérieur au coût prévisible de l’événement ». Le différentiel ayant manifestement vocation à alimenter les caisses du parti présidentiel… Il alerte ses chefs à Paris qui se mettent aux abonnés absents… Jean Billaud est devenu « gênant ». Il doit donc être sacrifié sur l’autel de la corruption. Il constitue une menace réelle pour le PS et pour François Mitterrand. L'Élysée met donc immédiatement son veto à sa présence et ordonne, illégalement, la rupture du contrat de Jean qui finira sa carrière de la seule façon qu'il n'aurait jamais pu imaginer : en gagnant un procès contre la France !  


Pour l’Élysée, Jean Billaud est non seulement clairement « étiqueté de droite », mais pire encore de « gaulliste de toujours ». L’ambassadeur lui annonce son « licenciement avec effet immédiat ». Jean Billaud rentre en France et saisit les tribunaux qui lui rendront justice. Dans cette longue bataille, il a dû se sentir bien seul. Comme l’écrit si justement Christian Paris, « les héros des périodes sombres finissent vite par déranger… »  


C’est ainsi que Jean Billaud, un homme dont les décorations gagnées sur les champs de bataille au service de la France occupent une page entière, a vu sa carrière brisée par un homme dont la seule décoration aura été la francisque du Gouvernement de Vichy...  


Après une vie bien remplie, Jean retourne à La Rochelle auprès des siens où il est fait citoyen d’honneur. Sans le merveilleux témoignage que nous a laissé Christian Paris avec ce livre, il serait un de ces « petit gars » comme la France a su en produire, « des hommes d’une seule fidélité » pour reprendre le mot de Christian Paris, et désigner un de ces héros anonymes qui a tout quitté pour prendre les armes et servir son pays dans l’honneur et la fidélité.  


A ceux qui souhaiteraient prolonger cet entretien avec cet homme d’exception, une personnalité attachante, on ne peut que conseiller de lire ce livre qui leur apprendra beaucoup de choses sur la grandeur et la petitesse humaine.  


Le témoignage de ce grand ancien nous a touchés. A 98 ans, pour ceux qui l’ont bien connu, il était resté le même : humble et décidé. Cet homme de l’ombre a su conserver jusqu’au bout une jeunesse et l’esprit qu’il avait déjà à 20 ans. La Covid aura raison de
lui. La Rochelle ne devrait pas tarder à consacrer une de ses rues à cet enfant du pays à qui l’armée de l’Air et de l’Espace a rendu les honneurs militaires. 


Joël-François Dumont 

[1] « De Gaulle m’a donné des ailes... La vie extraordinaire de Jean
Billaud » de Christian Paris aux éditions 7 écrit (Février 2018)  

[2] « Jean Billaud : un héros de la Seconde Guerre Mondiale tire sa révérence » :
Hommage de l’Armée de l’Air et de l’Espace (24-09-2020)

[3] RAF Elvington, Mémorial des deux groupes de bombardement lourd français (Squadron 346 « 2/23 Guyenne » et Squadron 347 « 1/25 Tunisie). 2.000 Hommes. La moitié sont « morts pour la France ».  

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Passagers si vous saviez, Mémoires d’un pilote de ligne

Difficile de résumer en 300 pages la vie d’un jeune « ancien » commandant de bord à Air France, Christian Paris, qui a tutoyé le ciel pendant plus de trois ans de sa vie en
heures de vol « cumulées », à 33.000 pieds, soit à plus de dix kilomètres d’altitude. Cela permet de voir les choses de haut, certes, mais aussi de constater qu’à bord on ne quitte pas complètement le plancher des vaches… Il paraît que « la cabine d'un avion exacerbe les comportements, révèle les personnalités, stimule tous les fantasmes. Lieu restreint et confiné, il est le théâtre de tous les possibles, le temps d'un vol… » 


Fraîchement publié aux Éditions Balland,[1] ce livre est plus qu’un livre de souvenirs ou d’anecdotes, même si certaines gagneraient à être plus largement partagées.  


Pour cette dixième émission Les Français qui parlent aux Français du bout du monde, la Voix du Béarn a décidé de prendre de la hauteur en s'intéressant à des Français qui, dans le monde, ont fait honneur aux ailes de la France pendant plus de 40 ans…  


Christian Paris n’a pas embarqué seul. Il est avec Jean Serrat – encore un jeune retraité – qui, comme lui, a été commandant de bord à Air France. Il est venu également avec le général Michel Tognigni, un ancien pilote d’essais de notre Armée de l’Air et de l’Espace qui est l’un des dix spationautes Français. Michel Tognigni a participé aux vols Soyouz TM14 et TM 15 et au vol STS-93, la 26e mission de la navette spatiale Columbia qui a mis en orbite le télescope spatial Chandra ! Il est donc un de ces très rares Français qui se sont aventurés dans l’espace avant devenir chef du Centre des astronautes européens… Là on change de dimension : de 10 km d’altitude on passe à plus de 100 et de 900 km/h à 28.000 km.  


Michel Tognigni a écrit la préface du livre de Christian Paris qui a bien failli, lui aussi, devenir spationaute. Habitués à des moments de solitude inédits, entraînés pour faire face à n’importe quelle situation d’urgence, ces trois hommes ont en commun une très grande humilité, comme tous ces hommes ou ces femmes d’exception qui ont un vécu hors du commun.  


On ne pouvait pas dans cette émission ne pas faire un clin d’œil à un ancien de la France Libre, terrassé par la Covid, Jean Billaut, un fidèle ami de Christian Paris à qui il a dédié son premier livre « De Gaulle m’a donné des ailes ».[2] De même on ne pouvait pas ne pas constater la tristesse de ces hommes quand ils ont évoqué la fin de leur carrière hors-norme. leur a fallu un beau jour suspendre leurs vols sur des machines volantes sophistiquées pour se limiter désormais aux joies simples du pilotage avec des petits avions privés. Pilote un jour, pilote toujours…  


Ce n’est pas sans tristesse dans la voix qu’ils évoquent certains souvenirs, certains amis communs. Et mieux vaut ne pas leur demander quel a été leur dernier vol en tenue ! Christian Paris aborde ce douloureux souvenir à la fin de son livre : « Pour clore 41 ans de nomadisme planétaire » sa « dernière destination ne pouvait que le conduire à Antanarivo chez » son « ami le père Pedro »,[3] « un proche du ciel », lui-aussi, qui a consacré sa vie aux déshérités et qui vit au milieu du peuple d’Akamasoa ».


On peut être certain qu’il a savouré chaque minute de ce vol « pour ne rien perdre de ces dernières sensations », entouré à bord de fidèles sans parler de ceux au sol qui le voient si souvent débarquer après plus dix heures de vol et avoir traversé d’un trait tout le continent africain. En quittant son Boeing 777 pour une 4L dont on ne compte plus les heures de vol, à Akamasoa, il est accueilli par le père Pedro qui a une surprise pour lui. Quand Christian est invité à pénétrer le premier dans l’église de ce village hors du commun, quelle n’est pas sa stupeur de voir 7000 enfants chanter et danser en son
honneur. Ce qu’il ressent « est d’une intensité que les mots ne sauraient traduire. Rapidement submergé par l’émotion, je me mêle aux danseurs pour la dissimuler »… Au micro, le père Pedro lui souhaite une bonne retraite sous les acclamations de ces 7000 jeunes Malgaches, de quoi « partir apaisé ». Et au retour sur son « triple 7 », un dernier « kiss landing » à Roissy pour s’attacher « les faveurs de cette terre sur laquelle je vais devoir apprendre à vivre ».   


Un très beau livre. Un grand moment partagé avec Jean-Michel Poulot derrière le micro. Les « vieux pilotes » (il n’y a pas de bons pilotes, il n’y a que des vieux pilotes, si l’on en croit les Américains manient parfois la plume comme ils ont tenu le manche. C’est le cas de Christian Paris qui fait reverser par l’éditeur, Balland, tous ses droits d’auteur à Akamasoa.  


[1] Passagers si vous saviez, Mémoires d’un pilote de ligne, Éd. Balland (juillet 2021) 

[2] De Gaulle m’a donné des ailes, Éd. 7 écrit (février 2018) 

[3] Père Pedro Opeka – Pour Akamasoa, la pauvreté n’est pas une fatalité – UFE Berlin
(31 mai 2021)  

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Les missions spéciales de la Douane

 En 1915, l’état-major français décide la création de l’École des missions spéciales pour former, dans le plus grand secret, des dizaines d’espions qui seront déposés de nuit par nos aviateurs derrière les lignes ennemies pour y mener des actions de sabotage et
de renseignement. 

Le profil recherché : des « hommes courageux pourvus d’une connaissance aiguë du terrain ». Le choix s’arrête sur le corps militaire des douanes et c’est à Hermonville que ces douaniers seront formés aux rudiments de l’espionnage ». Au-delà du flair légendaire attribué traditionnellement à nos « gabelous », c’est leur connaissance des départements frontaliers et pour certains de la langue allemande qui vont les désigner pour ces missions à haut risque. 

Après avoir subi un entraînement spécifique, les douaniers vont multiplier des missions très risquées, et réussir des faits d’armes inédits. Ces « missionnaires », vêtus en civil savaient que s’ils étaient pris, ils seraient fusillés comme espions après un jugement sommaire…
23 de ces 52 « missions spéciales » seront menées à bien par des douaniers et
couronnées de succès. Au-delà du renseignement tactique, les sabotages organisés contribueront à déstabiliser le dispositif ennemi. Leurs pilotes s‘appelaient Guynemer, de Rose, Védrine, Navarre ! Des hommes de légende...

Le premier mort de la guerre de 1870 est « préposé des douanes » : Pierre Mouty avait refusé de se rendre le 23 juillet au soir à Schreckling en Moselle. Le premier blessé de la guerre de 14, le 2 août à 4 heures du matin, est un « préposé des douanes » de la brigade de Suarce dans le Territoire de Belfort, Georges Laibe. En reconnaissance du rôle joué par les douaniers, le 14 juillet 1880, lors de la revue de Longchamps, le président Jules Grévy remettra au corps des douanes son premier drapeau. 

La douane ou les douanes ? Militaires en civil ou civils en uniforme ? Finalement, on sait très peu de choses sur la douane et encore moins sur nos douaniers ; Ils ont pourtant joué un rôle militaire significatif en première ligne dans toutes les guerres dans lesquelles la France a été engagée pendant plus de deux siècles. 

Pour honorer leur mémoire et traiter d’un sujet méconnu, la Voix du Béarn se devait de relater cette page d’histoire écrite avec le sang et la sueur de nos douaniers. Alors que certains pensent qu’avec la création de l’Europe les douaniers ont disparu, qu’ils se rassurent… Ils sont toujours en première ligne et fournissent même avec la DNRED l’un des six services de renseignement français. Face au terrorisme, à la criminalité organisée, aux trafiquants de drogue ou d’être humains, ils sont de ceux qui s’attaquent au nerf de la guerre. Leur « flair », certes légendaire, est prolongé par des moyens informatiques puissants. Sans parler des coopérations avec d’autres services de sécurité (police, gendarmerie) en France et à l’étranger ainsi que l’assistance opérationnelle de nos armées… 

Pour en parler, la Voix du Béarn a choisi de consacrer cette dixième émission des « Français qui parlent aux Français » à ces « missionnaires » pour leur rendre un hommage mérité. A cet effet, Joël-François Dumont s’est entretenu avec Yvan Chazalviel, ancien attaché douanier à Berlin.  

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La République tchèque : un futur champion en Europe ?

 Notre première émission consacrée à la République tchèque se devait d’avoir une suite…  

Jana et Joël Bros nous ont fait découvrir ce magnifique pays, au cœur de l’Europe centrale, qui en brisant ses chaînes, a retrouvé rapidement sa personnalité en savourant enfin son indépendance.   

Une indépendance récente qui remonte au 1er janvier 1993 après la scission de la « République fédérative tchèque et slovaque ». La séparation de la Slovaquie et de la Tchéquie a été assimilée à un « divorce de velours » suite à la « révolution » du même nom qui aura perduré du 16 au 29 novembre 1989. Une séparation sans liesse mais surtout sans violence entre deux pays qui, au lendemain de la Première Guerre Mondiale, après l’implosion de l’Empire austro-hongrois, s’étaient unis pour le meilleur et pour le pire dans une « Tchéco-Slovaquie » dont le trait d’union disparaitra bien avant 1948… 

Il ne faut pas oublier que les Tchèques ont été soumis pendant quatre siècles à la domination de souverains autrichiens – une domination incarnée notamment par la famille de Habsbourg – qui, pendant trois siècles, fournira tous les empereurs du Saint-Empire romain germanique. Une « maison royale » dont les chefs ont régné comme empereurs germaniques, rois de Hongrie et de Bohème sans discontinuer jusqu’en 1806, puis comme empereurs d’Autriche de 1804 à 1918…  

Les Slovaques eux ont passé mille ans sous domination hongroise…  

Mais cette « émancipation » tant attendue sera de courte durée : 30 ans. En 1948 le « rideau de fer » coupera l’Europe en deux. Staline installera des régimes communistes avec des économies planifiées et qui mettront au pas les populations récalcitrantes. On oublie trop souvent que de nombreux camps d’extermination nazis ont été maintenus en activité de 1945 à 1951 dans toute l’Europe centrale par les Soviétiques, faisant plus de 2 millions et demi de morts dans tous ces « pays de l’Est » dont le seul tort, en 1945, a été de se retrouver du mauvais côté de l’Europe… 

Le 12 mars 1999, la République tchèque adhère à l’OTAN et le 1er mai 2004, rejoindra l’Union européenne. Une adhésion qui sera approuvée par plus de 70% de la population. 

Si il y a un génie tchèque, on peut dire qu’il a été exporté pendant des siècles, dans toute l’Europe mais aussi aux États-Unis et en URSS. Un système scolaire de haut niveau, des universités de renom, le pays en s’affranchissant de ses chaînes soviétiques a forcé l’estime de ses voisins européens. L’économie tchèque s’est transformée, le pays s’est modernisé à marche forcée avec des résultats qui permettent de penser que la République tchèque sera, demain, un des pays les plus prospères d’Europe. Une vaste zone dans laquelle les Tchèques ont toujours su évoluer avec dynamisme, fournissant
des produits de qualité, sans oublier sur le plan culturel, littéraire, de nombreux artistes, des écrivains ou musiciens dont la réputation a été mondiale. 

C’est de cela que Jana et Joël Bros vont nous parler aujourd’hui pour nous expliquer comment cette « transformation » a pu se faire et qui sans constituer de miracle force néanmoins l’admiration. 

De plus en plus de Français s’installent en République tchèque qui est tout sauf « le bout du monde ». Le tourisme est prometteur dans ce pays magnifique, où l’on mange bien et où de très nombreux châteaux ont été restaurés pour servir d‘hôtels à des prix qui défient toute concurrence… 

Comment ne pas imaginer que la gastronomie locale et son tourisme de qualité ne fassent bientôt l’objet d’une prochaine émission… C’est promis, mais pas avant d‘avoir parlé d’un autre pays qui gagne à être mieux connu, la Slovaquie, aussi pour ses liens avec la France. Il y a quelques pages d’histoire qui gagnent à être partagées…  

[1] La république tchèque : A la découverte de la Moravie (1)